Le libéral, le soviétique, et l’artiste

 

 

Un costume-cravate entre.

*         Moi ? Moi !

Une blouse bleue-triste intervient.

*         Oui, je sais.

*         Les autres ? Qu’ils travaillent ! Enfin. Ils sont là, à ne rien faire et à ce plaindre ! Ces vieux, ces Sans abris, ces sans-papiers, ces sans-grade ! Ces parasites !Moi, je ne veux pas payer pour ces inutiles. Je veux profiter de mes biens, et qu’ils fassent de même.

Voici donc un libéral pur. Ne pense qu’à lui, auto légitimé par son compte en banque.

*         Votre classe dominante ne cherche qu’à s’enrichir sur le dos du peuple. Il faut balayer les vieilles ploutocratie qui détruisent ce qu’elles touchent, et remettre le pouvoir au peuple libéré de ces exploiteurs.

Voici un soviétique pur, désireux que nul ne puisse échapper à la loi du peuple.

*         Regardez, le peuple, à chaque fois qu’il est aidé, il en profite. Les Rmistes, par exemple, ne font rien. On leur paye en plus les soins, alors ils en abusent.

*         Oui ! Mais d’où tiens-tu ton argent ?

*         De mes capacités propres.

*         Qui a payé ton éducation, qui paye tes routes, tes hôpitaux ? Toi ? Non, le peuple. Ceux qui aujourd’hui sont morts. Et que tu as tués.

*         N’en parlons plus, alors !

*         C’est la société qui t’a construit tel que tu es, et tu ne veux rien donner ?

*         Je me suis construit moi-même !

*         Dans une famille privilégiée, dans un milieu protégé, avec une école en bon état. Et tu veux détruire ces institutions !

*         Pas du tout, mais que celui qui peut y aille, c’est tout.

*         Et ta fortune, comment te l’es-tu procurée, sinon par le travail d’autrui que tu utilises à tes fins personnelles.

*         Et alors ? Je profite d’eux car ils le veulent bien. Je suis plus intelligent, voilà tout !

*         Tu bases ta fortune sur l’exploitation d’autrui, en utilisant leur force de travail à tes fins, sans retour. Tu les maintiens dans un état qui ne leur permet pas de s’émanciper.

*         Heureusement.

*         Tu prends sans donner, et tu épuise les forces de travail de la terre. Les matières, les hommes, les richesses.

*         Je profite de ce que j’ai au moment où je l’ai.

*         Ton éducation vient des autres, ta fortune fut faite sur le dos de ceux que tu aliènes, tu détruits après avoir xploité, tu épuises les sols et la terre. Tu condamne tes enfants à vivre un monde invivable.

*         Mes enfants ont fait les meilleures écoles, leur avenir est sans nuage.

*         Tu formes une caste de parasites, qui comme eux, mangent sur leur victime sans contrepartie, jusqu’à ce qu’elle meure. Mais ils meurent à leur tour.

*         La mort fait partie de la vie.

*         Où qu’une révolte éclate qui mette terme à l’injustice.

*         Pour en remettre une pire encore. Laissez moi rire ! non. Nous avons le pouvoir économique, financier, idéologique, poltique, médiatique, policier. Que pourraît-il nous arriver ?

*         Lorsque le peuple se rendra compte que vous ne faites que l’exploiter sans retour, lorsque la pauvreté sera devenue la règle, lorsque les classes moyennes elle-mêmes se seront apauvries, votre système ne tiendra plus. Alors, la révolution l’emportera, le peuple dirigera. Nul ne pourra dépasser quiconque, tous seront égaux, solidaires, et bâtiront dans un but commun un avenir radieux, où ceux de votre classe n’auront plus lieu d’être, balayés par les forces du progrès. L’exploitation disparue, nous auront enfin une société sans classe, sans dominant ni dominé, sans faible ni forts.  

*         Oui, vous mettrez l’égalité partout, l’impossibilité de penser autrement sera la règle. La sclérose, l’anémie, la perte économique seront les nouvelles règles. Mais tôt ou tard, la pauvreté reviendra, dans un système où plus personne ne produira plus rien, et où tous seront, égalitairement certes, mais pauvres, très pauvres, plus pauvres que les pauvres de chez nous. Quelle avancée !

Survient un quidam

*         Ni l’un ni l’autre ! que des castes aux rentes infinies se permettent de détruire la planète pour emplir leur panse insatiable, qu’ils veuillent tout pomper pour accumuler indéfiniment des sommes dont le sens même échappe aux mortels, c’est insoutenable, inadmissible. Que des êtres qui ont vécus dans la difficulté de vivre se retrouvent pour un oui, mais surtout un non, sans rien qu’une miette trouvée à terre et volée aux moineaux, c’est inhumain !

*         Je réprouve !

*         J’approuve

*         Mais qu’une poignée d’individus, au nom d’une idée pure, détermine tout ce que doit faire du berceau au tombeau un être humain, au nom de la plus stricte égalité, cela est insoutenable ! que la moindre pensée dite sauvage soit réprimée au point que l’ensemble des citoyens conscients finissent par avoir peur d’aller dans des camps, cela est abominable !

*         Vous voyez, cela ne tient pas.

*         Vous exagérez !

*         Ni l’un, ni l’autre. La médiété aristotélicienne !

D’un commun accord

*         Oh le vilain mot !

Le quidam insiste ;

*         Oui, que la justice, l’équité, la liberté, soit le guide. Que le public serve au public, sans enrichir des riches qui n’en sont que plus blasés. Que l’imagination s’exprime, librement, sans contrainte d’un résultat financier ou idéologique, pour la beauté de l’âme et du corps ! que la discussion ouverte, franche, soit la plus ouverte qui soit, avec contradictions, conflits, désaccords,

Ensembles, le libéral et le soviétique sortent leur revolver.

*         Il doit payer !

Ils tirent, l’artiste s’écroule !