Aujourd’hui, nous sommes
entrés dans un tournant capital pour notre avenir.
D’une part, les ressources
de la planète viennent à manquer, d’autre part, la consommation que nous en
faisons menace les équilibres écologiques.
Il y dix ans encore, nous
pouvions ignorer les faits. Le prix du pétrole restait plus ou moins stable,
les réserves ne semblaient pas diminuer, les ressources alimentaires pouvaient
nourrir le monde, même si des îlots de misère subsistaient, la lutte contre la
faim devait pouvoir être gagnée, le changement climatique semblait une
hypothèse théorique à laquelle des solutions techniques allaient répondre.
Aujourd’hui, rien ne va
plus. Le changement climatique est bien réel, les ressources viennent
sérieusement à manquer, la faim s’étend plus qu’elle ne se résorbe.
Devant pareil enjeu, de
survie pour notre société, il est bon de revenir en arrière. Et de constater
que les civilisations sont éphémères, disparaissent parfois en quelques années,
parfois en plusieurs siècles. Certaines au contraires subsistent. Le dossier de
Science et Vie à ce propos est intéressant. Nous savons que l’empire
mésopotamien s’est effondré suite à une désertification casée par une
irrigation excessive, la civilisation de l’île de Pâque s’est épuisée par le
manque de bois. Plus prés de nous, la fin de la monarchie française est pour
une bonne part due aux famines à répétition subie par la population.
Un point commun de ces
diverses disparitions réside notamment dans l’inconséquence de ces civilisation
face aux défis survenus par la transformation de leur écosystème. Ou la
conscience du problème n’était pas présente, ou cette conscience ne les amenait
pas à changer de comportement, par inertie d’une société conçue a priori comme
inébranlable, ou croyance d’un sauvetage par une puissance divine, par
l’extérieur.
Tout ceci donne à penser que
la survie d’une société soumise un
bouleversement soit environnemental (la Mésopotamie), soit humain (Rome) est
soumise à certaines conditions qui lui permettent de réagir efficacement, et
des obstacles externes ou internes qui l’immobilisent, ou lui font suivre de
fausses solutions.
Les obstacles :
Le premier obstacle est bien
entendu la non prise de conscience du problème, du à l’ignorance de la
civilisation des transformations, voire de la dépendance à certains facteurs.
Nous pouvons dire qu’heureusement pour nous, ce n’est, ou plus le cas :
nous savons, nous connaissons les enjeux.
Le deuxième obstacle est la
conviction d’une nécessité d’agir : les croyances divines, l’idée d’une
surpuissance, d’un sauveur extérieur, créent une attente qui se révèle non
salvatrice, et engendre la passivité. Là non plus, nous ne tombons pas dans ce
travers, au moins pour une part éclairée des populations, et surtout des
décideurs.
Le troisième obstacle, et
non le moindre, est l’avidité, la cupidité, qui font agir les individus non pas
en vu d’un bien commun, mais pour eux-même. Sauvons-nous nous-même et tant pis
pour les autres. L’île de Pâque aurait pu sauver sa civilisation si les élites
aveint renoncé aux honneurs destinés aux familles dirigeantes pour sauver la
forêt. Il n’en a rien été. Notre civilisation, actuellement, en est à cette
pierre d’achoppement. Il est visible que les élites économiques ne veulent rien
lâcher. Un comportement type panique peut d’ailleurs advenir, comme Rome des
derniers temps, où les élites faisaient des dépenses somptuaires alors que tout
le système s’effondrait. Ce type de comportement, au sommet, se transmet par
vagues à l’ensemble de la population, et aucune gestion cohérente des
ressources n’est alors possible.
Les conditions :
Le corollaire des obstacles
est dans les conditions : conscience de des problèmes, capacité d’agir et
volonté partagée par tous d’agir dans le sens du bien commun. C’est cette
dernière condition qui, dans la civilisation actuelle pose problème.
Nous avons développé les
sciences et les techniques, nous savons qu’un Dieu n’agira pas à notre place,
nous avons tous les éléments pour agir, mais la volonté commune semble manquer.
Les élites économiques
d’abord, qui par le contrôle de l’économie de Monde, avec l’extension des lois
seules du marché, veulent s’assurer des conditions de leur propre survie, sans
voir les conséquences pour les populations, qui n’en peuvent plus.
Les élites politiques, plus
proches que jamais de ces dernières, refusent de mettre des barrières à
l’extension infinie de la richesse de quelques uns. Or comment partager le limité
si une limite aux plus avides n’est pas fixée ? Comment gérer les
ressources de façon durable si la loi empêche toute gestion saine, ou si seuls
les pauvres subissent ces restrictions ? l’injustice paraît flagrante et
les contraintes inadmissibles. Par ailleurs, les élites n’étant pas soumises à
la loi commune, elles n’ont pas intérêt à limiter leur propre poids écologique,
puisque leurs ressources, à eux, sont considérées sans limite. Il est évident
que le jour où leur consommation personnelle sera touchée, le reste de la
population sera dans un état indescriptible, s’il en reste.
Le reste de la population,
conditionnée par les élites pour produire/consommer au plus, ne va pas
d’elle-même se limiter, ce qui est aujourd’hui considéré comme socialement
incorrect. Celui qui prend l bus est considéré comme un pauvre, voir un pauvre
c. , vis-à-vis de celui qui possède une Porsche 4x4 (oui, ça existe!). la
société continue d’aller dans le sens du plus, et non du moins.
La situation actuelle
Cette situation, avec des
inégalités monstrueuses au niveau de la planète, et une élite qui ne veut pas
céder sur le terrain matériel/économique, ne nous permet guère d’être
optimiste.
Il nous faut influer sur nos
élites politiques, afin qu’elles se soucient réellement du problème en voie de
trouver des solutions concrètes, qui passent par une gestion partagée des
ressources, aller au-delà du processus de Tokyo qui finalement vise à
distribuer des permis de polluer et à coter le CO2 en bourse, ce qui semble
inefficace compte tenu de l’état du système, même si des objectifs de
diminutions sont définis.
Dans l’état actuel de
conscientisation des élites, c’est-à-dire le néant, il faudrait créer des îlots
de réflexion, de partage et d’action, qui peuvent devenir majoritaires par
percolation.
Mais il faut faire vite, car
la poursuite de la pente du pire peut nous faire vivre une société où le chacun
pour soi l’emporte, avec un pilage accru des ressources jusqu’à leur épuisement
final, et l’extinction, non des l’espèce humaine, mais de la civilisation comme
lieu d’échange, de culture, et de conscience.
L’humanité peut être durable
si elle veut s’en donner les moyens, ce qui passe notamment par le partage et
l’autolimitation.
Jean-Paul Foscarvel